Une invitation à une plus grande présence
Massages traditionnels et méditation:
« Les massages traditionnels comme les différentes postures de méditation temporalisent le présent par des actes sans objectif, sans visée, sans attente d’un retour. S’installer dans le présent, mouvement après mouvement, respiration après respiration, sans anticipation, sans projection, génère en soi un acte de présence. Le seul temps dont nous portons la responsabilité est celui de l’instant présent.
Il est alors question d’accomplir les gestuelles des massages traditionnels dans un enchaînement d’actes sans intention, sans finalité, comme si rien ne devait succéder à chaque mouvement, comme si c’était le dernier… les protocoles de ces massages traditionnels sont structurés par des séquences qui se déploient dans un enchaînement continu qui lui-même s’ajuste, s’actualise et se nourrit de ce qui est là.
Le praticien en massages traditionnels – homme de l’art, de la voie, du tao et du dharma – ne se place pas sur un mode volontaire. Il expérimente à chaque fois, comme un jour nouveau, l’ouverture, la disponibilité, l’attention à ce qui est. Dans une attention sans cesse en mouvement il s’essaie à la présence, en expérimentant une distance et une proximité toujours évolutives des corps et ce, au cœur d’une relation d’accompagnement ouverte sur l’inconnu.
Les massages traditionnels ont une vocation « d’écoulement ». Il convient pour le praticien de se donner les moyens d’être travaillé par la présence, l’ancrage, le centrage, à laisser passer les ressentis, les émotions, les pensées sans se laisser emporter par ceux-ci.
Être là, tout simplement là, sans intention, sans agir, sans vouloir quelque chose pour l’autre.
Le positionnement contemplatif et méditatif du praticien en massages traditionnels facilite le continuum de la vie. En élargissant ainsi le champ de déploiement de la conscience, en favorisant la fluidité de l’instant par l’absence d’intention, en encourageant la transition continue de l’énergie, le praticien crée un espace privilégié d’attention à la vie.
Lorsque le praticien masse, il masse… lorsque le bénéficiaire est massé, il est massé. Cette mutualisation de présence partagée donne de la consistance, de l’épaisseur à ce qui est vécu, dans l’instant.
Chaque mouvement est ainsi vécu en présence. Chaque mouvement devient un temps de disponibilité, d’opportunité, d’évolution et de transformation.
Au contraire de l’action, le mouvement de la transformation est une mouvance qui progresse par influence, par imprégnation, et qui advient en l’absence d’intentionnalité et de déterminisme. La transformation obéit à des mutations profondes, secrètes et tranquilles que l’on ne perçoit pas soudainement mais qui effleurent notre quotidien par touches successives.
Une pratique régulière de cet art du toucher que sont les massages traditionnels constitue l’opportunité de se détendre dans le calme de l’instant présent afin de renouer avec ses pleines facultés sensorielles et psychiques. En se « dé-tendant », en étant sans visée, en se laissant mouvoir et nourrir par la vie présente, par ce qui est, c’est s’offrir renouvellement et épanouissement.
L’harmonie, l’homéostasie, le bien-être, naissent de cette fluidité. »
Roger Daulin, publié dans « Bouddhisme Actualités », Janvier 2013